La maîtrise des risques sanitaires liés à la production d’eau potable exige une vigilance depuis la ressource jusqu’au robinet du consommateur. En complément des actions générales de préservation du milieu, {{les périmètres de protection autour des points d’eau est l’outil privilégié pour prévenir et diminuer toute cause de pollution locale.}} La progression du nombre de captages protégés reste laborieuse (La moitié des captages seulement est protégée à l’heure actuelle) dans la mesure où leur mise en place entre souvent en conflit avec les autres usages de l’eau ou du sol et que la procédure demeure coûteuse et fastidieuse. La loi du 3 janvier 1992 donnait pourtant cinq ans aux collectivités pour mettre en place les périmètres de protection, soit avant le 3 janvier 1997. Une circulaire n° 97-2 du 2 janvier 1997 a par ailleurs opportunément rappelé aux collectivités que leur responsabilité pouvait être engagée pour imprudence ou négligence si l’eau du captage se révélait impropre à la consommation par défaut de protection.
Pour ces raisons, la loi du 9 août 2004 est venue généraliser le dispositif des périmètres de protection et simplifier les conditions de leur définition. Parallèlement, le gouvernement a adopté le 24 juin 2004 un plan national Santé-Environnement qui a fixé, parmi ses priorités, la mise en œuvre effective des périmètres de protection avec l’objectif d’une protection complète des captages en 2010. Le 2ème Plan pour 2009-2013 visait pour sa part la protection des aires d’alimentation des 500 captages d’eau les plus menacés.
Définis par un hydrogéologue agréé désigné par l’hydrogéologue coordonnateur départemental, ces périmètres correspondent à un zonage établi autour des captages d’eau potable. L’instauration de ces périmètres est effectuée par l’acte qui déclare d’utilité publique les travaux de prélèvement d’eau potable (art. L1321-2 du Code de santé publique et L215-13 du Code de l’environnement) qui relève de la compétence du préfet de département (art. R1321-6 CSP).
L’arrêté d’autorisation fixe les conditions de réalisation, d’exploitation et de protection du point de prélèvement, ainsi que les produits et procédés de potabilisation appropriés auxquels il peut être fait appel.
{Photo © Office International de l'Eau}
Le législateur enserre le lieu de captage de l’eau dans trois zones, avec une gradation des mécanismes en fonction de l’éloignement du point de captage. La loi de 2006 est venue compléter ce dispositif en instaurant une zone de protection plus large.
Ce périmètre a pour objet d’interdire toute introduction directe de substances polluantes dans l’eau prélevée et d’empêcher la dégradation des ouvrages. Les terrains doivent régulièrement être entretenus et être clôturés sauf dérogation dans la déclaration d’utilité publique (art. R1321-13 al 2 CSP). Tous les travaux, installations, activités, dépôts, ouvrages, aménagements ou occupations des sols y sont interdits, exception faite de l’exploitation et entretien des équipements et des activités autorisées dans l’acte de déclaration d’utilité publique.
Depuis 2004, l’établissement de ce périmètre de protection doit être généralisé à tous les captages publics antérieurs au 18 décembre 1964, même lorsqu’ils bénéficient d’une protection naturelle efficace avant le 10 août 2009 (art. L1321-2 al. 4 CSP). Afin de faciliter l’instauration de ces périmètres et d’en garantir l’efficacité, il est possible de ne créer qu’un périmètre de protection immédiate si les conditions hydrologiques et hydrogéologiques garantissent un risque limité de diffusion des pollutions (art. L1321-2 al. 2 CSP).
L’article L1321-2 al. 1 CSP prévoit que les terrains situés à l’intérieur du périmètre de protection immédiate doivent appartenir à la collectivité. Un alinéa a été ajouté à cet article pour les cas où les terrains situés dans ce périmètre appartiennent déjà à une collectivité publique (Etat ou collectivité territoriale). Dans cette situation, la collectivité signe avec le propriétaire des terrains une convention de gestion et d’occupation. Lorsque le propriétaire n’est autre que l’Etat, une telle convention a le caractère d’une concession. Elle confère à la collectivité la qualité de maître d’ouvrage pour tous les travaux à réaliser à l’intérieur de ce périmètre. En outre, cette dernière conserve la maîtrise des terrains tout au long de l’exploitation.
De superficie beaucoup plus large, le périmètre de protection rapproché est une zone où sont interdites les mêmes activités que celles concernant le périmètre immédiat qui seraient susceptibles d’entraîner une pollution de nature à rendre l’eau impropre à la consommation. Elles peuvent faire l’objet de prescriptions, et sont soumises à une surveillance particulière, prévue dans la déclaration d’utilité publique (art. R1321-13 al 3 CSP).
Ce périmètre vise ainsi à protéger efficacement le captage vis-à-vis de la migration souterraine de substances polluantes. Sa surface dépend des caractéristiques de l’aquifère, des débits de pompage, de la vulnérabilité de la nappe.
Sont généralement interdits dans ce périmètre :
- {{Le forage et puits}} autres que ceux nécessaires à l’extension du champ captant et à la surveillance de sa qualité ;
- {{L’exploitation des carrières à ciel ouvert}} (à titre d’exemple : CAA Nantes, 9 mars 2004, M. Frault), l’ouverture et le remblaiement d’excavations à ciel ouvert ;
- {{Le dépôt d’ordures}} ménagères, immondices, détritus et produits radioactifs et de tous produits et matières susceptibles d’altérer la qualité des eaux ;
- {{L’installation de canalisations, réservoirs ou dépôts d’hydrocarbures liquides ou gazeux, de produits chimiques et d’eaux usées domestiques ou industrielles}} ;
- {{L’épandage ou l’infiltration des lisiers et d’eaux usées d’origine domestique ou industrielle.}}
Les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à déclaration dans la nomenclature du décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relève du régime de l’autorisation dans ce périmètre pour les demandes reçues avant le 1er octobre 2006 (art. 2 du décret de 1993). S’agissant des demandes postérieures à octobre 2006, elles restent seulement soumises à déclaration, à l’exception de celles situées à l’intérieur d’un périmètre de protection rapprochée d’une source d’eau minérale naturelle. Il en va de même concernant les opérations de sondage ou de travail souterrain.
Afin de faire garantir de façon active par les communes la protection de la ressource en eau, deux nouveaux outils ont été créés par la loi du 9 août 2004. L’un permet à la collectivité ayant acquis des terrains situés à l’intérieur d’un périmètre de protection rapprochée de déroger au statut de fermier dans ses relations avec les exploitants agricoles locataires de ces terrains. En effet, le fermage, qui garantit notamment au fermier la possibilité de choisir librement le type de culture sur la parcelle affermée, est d’ordre public et prévalait sur toute convention particulière. Désormais, il appartient à la collectivité d’imposer des modes de culture spécifiques, en vue d’assurer la préservation de la ressource en eau (art. L1321-2 al 8 CSP).
Si le juge administratif a admis que des terrains peuvent être acquis par voie d’expropriation (Conseil d’État, 13 décembre 1967), la loi de 2004 permet maintenant pour {{les communes et les EPCI concernés d’instaurer, par délibération, le droit de préemption urbain}} au titre de l’article L211-1 du Code de l’urbanisme (art. L1321-2 al 10 CSP). Ce droit permet de se porter acquéreur, de façon prioritaire, des terrains situés dans la zone visée par la délibération. De la même manière qu’un EPCI est compétent pour l’élaboration des documents d’urbanisme, il l’est également de plein droit s’agissant de l’instauration du droit de préemption urbain. C’est la raison pour laquelle l’article L1321-2 al 10 CSP prévoit également que ce même EPCI peut alors déléguer sa compétence en matière de droit de préemption, à la commune ou à l’EPCI directement responsable de la distribution d’eau. De telles mesures permettent ainsi à la collectivité d’acquérir les terrains les plus sensibles sans recourir à la procédure lourde et coûteuse de l’expropriation.
Le périmètre de protection éloignée est une zone dans laquelle peuvent être réglementés (et non interdits) les activités, installations et dépôts, ouvrages, aménagements ou occupations des sols qui, compte tenu de la nature des terrains, présentent un danger de pollution pour les eaux prélevées ou transportées, du fait de la nature et de la quantité de produits polluants liés à ces activités ou de l’étendue des surfaces que ceux-ci occupent (art. R1321-13 al 4 CSP). Il a vocation à couvrir toute l’étendue du bassin versant alimentant la ressource superficielle ou souterraine concernée. C’est la raison pour laquelle son institution n’a pas de caractère obligatoire.
Afin de lutter contre les pollutions diffuses, la loi de 2006 crée de nouvelles zones plus larges que les trois périmètres précédemment cités. A ce titre, elle habilite le gouvernement à délimiter, par décret en Conseil d’Etat, des zones où il est nécessaire d’assurer la protection des aires d’alimentation des captages d’eau potable d’une importance particulière pour l’approvisionnement actuel ou futur (art. L211-3 II 1° et 5° C.env.).
Le décret 2007-882 du 14 mai 2007 prévoit que, dans les mêmes conditions que pour les zones humides d’intérêt environnemental particulier, l’État – par l’intermédiaire des préfets – peut y définir un programme d’action, comportant également des bonnes pratiques agricoles à promouvoir. Spécifiquement pour ce qui concerne les captages, le nouvel article R114-8 du Code rural tel que remplacé par le décret de 2007 dispose en outre que « dans les zones de protection des aires d’alimentation des captages délimitées en application de l’article R. 114-4 et dans les douze mois qui suivent la publication du programme d’action, le préfet rend obligatoires les mesures de ce programme pour lesquelles il estime que les objectifs prévus ne seront pas atteints à l’issue de cette période de douze mois ».
Ces plans d’action visent à garantir une bonne qualité des eaux dans les aires d’alimentation des principaux captages, soit environ 900 unités desservant chacune plus de 10 000 habitants. Les actions à promouvoir peuvent notamment consister à mettre en place des dispositifs enherbés, des aménagements limitant le transfert de résidus de pesticides ou à contraindre à la rotation des cultures. Le préfet est également chargé d’élaborer un projet de délimitation d’aires d’alimentation des captages d’eau potable. Elles devront être identifiées dans le plan d’aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques élaboré dans le cadre du SAGE (art. L212-5 C.env.).
Pour aller plus loin, vous pouvez consulter les fiches du guide des services sur :
- La déclaration d’utilité publique
- Périmètres de protection de captage, PLU et documents d’urbanisme
Mais aussi :
- Procédure décrite dans la circulaire du 24 juillet 1990 (JO du 13 septembre 1990)
Schémas :
- Agence de l’eau Seine-Normandie : Protégeons, sécurisons, préservons nos bassins d’alimentation, nos captages, notre eau potable, 2009
- Agence de l’eau Rhin-Meuse : Alimentation en eau potable, reconquête et préservation des captages d’eau potable, 2010)
Références :
- Loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau
- Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique
- Décret n°93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau
- Décret n°2007-882 du 14 mai 2007 relatif à certaines zones soumises à contraintes environnementales et modifiant le code rural